Interview stylée-décalée :
« Pourquoi le noir ? »
Cédric Tourrette : Pour le deuil voyons !!!!
« Seulement ? »
C.T : Non, c’est une valeur avec laquelle tu peux atteindre chaque nuance : un noir lumineux, euphorique et à l’inverse très sombre. C’est une sorte d’identité pour moi, une valeur à laquelle je tiens. Je peux jouer avec, peu importe mon état d’esprit. La difficulté intervient à ce moment –là : retranscrire des sentiments teintés de béatitude au travers de l’obscurité.
« La matière dans laquelle tu te sens le mieux ? »
C.T : La dentelle de calais.
« C’est très classique ? »
C.T : Comme le noir… On arrive à la moderniser, c’est la transparence qui est intéressante. Sur la peau on obtient un très joli rendu. On peut dissimuler facilement et laisser apparaître seulement les parties que l’on souhaite montrer.
« C’est une forme de contrôle tout cela ? »
C.T : En permanence.
« Si je te dis flou »
C.T : De la mousseline. Je ne l’utilise jamais d’ailleurs par manque de contrôle…
« Si je te dis lumière »
C.T : Le contraire : obscurité.
« Ton déclic ? »
C.T : Alexander Mac Queen, selon moi l’homme le plus fascinant. Il travaillait à contre-courant, il partait toujours d’une émotion afin d’arriver à un résultat fabuleux.
« Tu l’as découvert comment ? »
C.T : Dans un édito de magazine (Vogue), « beauté immortelle » je crois. Des teintes automnales avec lesquelles il avait composé une ambiance mortuaire endormie, pas macabre. Une douce mort…
« Où tout commence ? »
C.T : Avec la musique, une ambiance musicale qui suit mon ouvrage. Tu passes beaucoup de temps à faire des croquis, à déchirer, recommencer… D’une collection à une autre un long moment s’écoule pour éviter la redondance. Sauf la corsetterie qui fait partie intégrante de chacune de mes compositions.
« Où tout finit ? »
C.T : Quand la photo est prise !! Tout est fini quand je peux regarder le vêtement plusieurs jours de suite sans avoir envie de rajouter, d’enlever…
« Tes ambitions ? »
Essayer de retranscrire au mieux les futures collections avec la nouvelle collaboration. Me situer sur des projets plus artistiques. Arriver à créer une identité personnelle, un univers bien défini, une teinte particulière.
« Pourquoi Motel and hell ? »
C’est le premier projet qui a deux pères !!! C’est dans l’air du temps !!!! Parce-que je crois aussi que c’est un réel aboutissement. C’est une rencontre artistique, motivante, qui m’a redonné l’envie de réaliser. Il y a le film aussi Motel Hell des années 80, comédie dramatique, sanglante, moteur d’inspiration. Le but du jeu est de l’interpréter, en introduisant la mode.
« Comment l’imagines-tu ? »
Diabolique !!!! Avec de nombreuses symboliques, comme l’avènement de quelque chose de nouveau.
D’écraser un peu le passé.
« Quelle nouveauté ? »
C.T : Un homme !! On l’a beaucoup fantasmé dans les autres collections et il était important de lui donner un visage.
« Comment le veux-tu ? »
C.T :Présent par le corps, rien d’autre. Le reste ne m’intéresse pas. Il aura pour une fois le rôle que l’on veut lui donner et non pas celui qu’il veut prendre.
« Et la femme ? »
C.T :Elle assumera son rôle, toutes ses qualités seront mises en exergue et il ne s’agira pas cette fois -ci de domination, ni de contrôle.
« Quelle sera sa carapace ? »
C.T :Aucune.
« Tu lis quoi en ce moment ? »
C.T :Hôtel de Dream.
« Ca parle de quoi ? »
C.T :La prostitution masculine dans les années 30.
Il y a aussi Oscar et la dame Rose, c’est une dame qui assiste à la fin de vie d’un petit garçon et elle lui conte sa vie comme un roman chaque jour. C’est très paradoxal car il y a de la tristesse mais en même temps une force, une énergie positive me pousse à lutter contre cela.
« Le film ? »
C.T :Billy Elliott.
« La chanson »
C.T : Life on mars de David Bowie.
« Ton humeur »
C.T : (Soupir) Mélancolique en ce moment, du rire aux larmes, maussade, comme d’habitude, beaucoup de choses changent sauf ça !!!!
« Ta force ? »
C.T :Persévérance.
« Ta faiblesse ? »
C.T : La lassitude.
(Il boit alors une gorgée d’eau, allume une nouvelle cigarette et rit à mon aparté)
« Ton monde parfait ? »
C.T :Un monde sans guerre sans haine !!!! (Il rit) Non je plaisante !!! Sans ennui je pense, je crois que c’est la pire des choses. Il ne peut pas y avoir de monde parfait donc égoïstement de façon très nombriliste, sans ennui.
« Tu t’ennuies ? »
C.T :Trop souvent. J’arrive parfois à m’ennuyer de moi-même. Je m’extraie de mon corps et me trouve d’un ennui mortel et c’est là que je me dis qu’il faut réagir.
« Et c’est là que naissent les nouveaux projets ? »
C.T :Toujours.
« Au final l’ennui est fructueux ? »
C.T :Toujours.
« Ton futur projet sera donc boring ?!! »
C.T :Cela pourrait être intéressant.